The Doors
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 long chemin du retour

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AuteurMessage
Dave Clayton
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Dave Clayton


Messages : 29
Date d'inscription : 01/02/2016

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MessageSujet: long chemin du retour   long chemin du retour EmptySam 28 Mai - 19:23

Un jour après l'autre, tous pareils ou presque. Une routine soyeuse et bien huilée sans lieu pour changements notoires et encore moins de surprises. Ennui? On pouvait y penser mais ce n'était pas exactement le cas, c'était encore pire, plus lassant, plus sournois. C'était une ingrate sensation de vacuité qui rongeait l'âme, réduisant tout élan de joie de vivre en un incertain besoin de liberté.
Il pleuvait. Rien d'étonnant, c'était bien la saison. Pluie, vent, froid, du gris partout, ciel et nature conjugués en cet hiver morne. Même les verts persistants du jardin semblaient fanés, éreintés et tout se fondait dans une sorte de moue malheureuse.

Madeleine soupira, laissa retomber le voilage et s'éloigna de la fenêtre pour aller s'affaler dans son fauteuil préféré. Un roman auquel elle ne finissait pas de trouver intérêt attendait ouvert sur la table basse.

Madame désire t'elle son thé?

La voix de Solange la fit sursauter, comme d'habitude.

Vous devriez vous accrocher une clochette, comme les chats!, grommela Madeleine, au moins on saurait que vous rôdez par là...et non, je ne veux pas de thé, je n'aime pas le thé, vous devriez le savoir...ça fait plus de quinze ans que je m'échine à le dire...

Oui, Madame!, souffla la petite bonne en désirant que la terre l'avale, c'est que...

M'en doute...Mme. Chien de garde vous en a donné l'ordre.

Solange pouffa, c'était plus fort qu'elle mais se reprit aussitôt.

Allez lui dire que je bois le cognac de feu mon mari et décroche les tentures pour les mettre au feu!

Je n'oserais jamais...

J'ai pourtant bien envie de le faire, assura Madeleine, elles sont affreuses! Allez, pas la peine de faire cette tête, ma bonne Solange...dites à Pierce que je dors, point barre...et arrêtez d'avoir peur de cette vieille mégère...

Solange fila sans demander son reste en pensant que ne pas avoir peur de la gouvernante de la maison était bien plus facile à dire qu'à faire. Mme. Pierce était plus proche d'être un féroce pitbull qu'une femme ordinaire.

Ce semblant de paix dura peu moins d'un quart d'heure. Madeleine qui ne dormait pas du tout devina plus que n'entendit l'entrée en scène de Pierce en personne.

Qu'y a t'il maintenant!?, rugit Madeleine, réjouie de prendre les devants, on ne peut plus se reposer dans cette maison!?

Madame de Neuville sera là dans une demie heure, vous ne pensez tout de même pas la recevoir dans cette tenue!

Sourcil arqué, regard désabusé tout autant que la petite moue ennuyée.

Et bien, on a un problème alors...je me sens très à l'aise avec cet que je porte et n'ai aucune envie de courir passer une tenue de gala pour recevoir Madame!

Madame est votre belle-mère!, s'étouffa Pierce dont le teint tournait au brique soutenu.

Madeleine se leva, s'étira comme si elle venait de quitter son lit, bâilla sans retenue et adopta son air le plus ennuyé possible.

Et moi je suis maîtresse chez moi, ne vous en déplaise, alors quand Madame arrivera conduisez la au salon et faites moi prévenir par Solange. Avez vous encore quelque chose à me dire, Pierce?

La gouvernante pinça les lèvres et tira une enveloppe bleue de sa poche.

Ceci est arrivé par courrier spécial il y a quelques minutes!

Madeleine lui prit l'enveloppe des mains et l'examina, elle venait d'un cabinet d'avocats.

Vous auriez pu commencer par là! Disposez!!!

Sans attendre que la gouvernante soit sortie, Madeleine ouvrit l'enveloppe, en tira les deux feuillets qu'elle contenait et commença à lire et dès les premières lignes comprit que sa vie venait de prendre un tournant inattendu et qu'enfin, après tant de temps perdu, elle avait enfin l'opportunité d'échapper à la triste routine de son existence.

Marie-Alice de Neuville-Croisy, se tenait, majestueuse, près de la fenêtre, semblant éperdue dans la contemplation du jardin noyé de pluie. En fait, Madame se souciait très peu du paysage, elle était trop agacée pour se laisser à un bucolique quelconque. Chacune de ses rencontres avec Madeleine était une épreuve et cela ne changerait pas de sitôt. La jeune femme parvenait à la mettre dans tous ses états avec son caractère opiniâtre et survolté. Si elle, et tout le monde d'ailleurs, s'était fait l'illusion de voir le mariage l'assagir et la rendre plus raisonnable, il avait fallu remiser ces bons souhaits et s'armer de patience.

Marie Alice, quel vent mauvais vous a poussée jusqu'ici!?, scanda Madeleine en entrant dans le salon et la faisant sursauter.

Seigneur, quelles manières...que te prend t'il donc de crier de la sorte!?

J'ai crié!? Vraiment?...Suis sûre que non! Vous devenez décidément sensible! Alors...à quoi dois je cette visite? Je peux parier que vous n'êtes pas venue pour vous enquérir sur ma bonne santé...et au cas où...je vais bien, merci, aucun mal mortel ne me ronge et je suis même de très bonne humeur!

Mme.de Neuville la toisa sans aménité, en fronçant un peu le nez comme si une mauvaise odeur la dérangeait soudain.

De bonne humeur?

C'est pas interdit au moins? Que vous soyez du genre sérieux ne veut pas dire qu'on doive tous s'y mettre!, débita t'elle avec un sourire angélique tout en se laissant aller dans un fauteuil sans se soucier le moins du monde du fait que sa belle-mère reste debout.

Tu es agaçante au plus haut point!

On me le dit souvent, oui!

Avec un soupir ulcéré Madame prit place face à le jeune femme tout en lui décochant un regard glacial qui resta, comme on aurait pu prévoir, sans le moindre effet.

Et alors, vous n'avez pas fait le déplacement juste pour parler de mes vertus, le vidéophone reste un moyen fiable pour le faire savez vous, mais vous êtes là...

Soit! Je suis venue en personne pour insister sur ta présence au gala de charité de la semaine prochaine, c'est un événement...

De la plus grande importance, une opportunité de parader un peu, de voir et être vu...et comme pense sans doute ma mère de me remettre sur le marché dans l'espoir de me voir dégotter un nouveau mari...

L'auguste dame ne réprima pas le haut de corps, outrée par tant de franc parler.

Je t'en prie, Madeleine, personne ne peut avoir pareille idée...après la mort de mon Paul chéri...

Ben justement, belle-maman, c'est le moment ou jamais...on dit bien..."Le roi est mort, vive le roi!"...mais ne vous en faites pas...aucune envie de récidiver...l'expérience a été suffisamment mauvaise et puis c'est non!

Non!?

Exactement...non! Ne comptez pas sur moi pour le gala de charité, je ne ressens aucun besoin de voir et être vue...vous aurez ma donation, cela va de soi mais ce sera tout!

Belle-maman accusa sans broncher, presque de bonne grâce mais Madeleine la connaissait trop bien comme pour ne pas deviner que la mère de Paul avait encore une requête, et sans doute pas des moindres si on tenait en compte l'éclat farouche quoique teinté d'une certaine angoisse dans son regard voulu impérieux.

Et bien, Marie Alice, encore quelque chose?

Léger sursaut.

"Je te tiens!"

Oui, en effet, je veux que tu m'accompagnes chez Maître Lanz, pour signer quelques documents!

Madeleine fronça les sourcils, en lui décochant un regard suspicieux.

Je ne vois pas de quels documents il pourrait s'agir. J'ai signé tout ce qu'il fallait signer au moment voulu et tout était parfaitement en règle...de quoi me parlez vous là?

Du pouvoir dont j'ai besoin pour gérer ton portefeuille d'actions de la société familiale, informa-t'elle d'une traite.

L’éclat de rire de sa belle fille lui fit l'effet d'une bombe éclatant au milieu du salon.

Vraiment!? Vous croyez vraiment que je suis assez sotte pour me laisser berner de la sorte? Vous signer un pouvoir, et quoi de plus?, son hilarité cédant d'un cran, elle prit un air presque sérieux en poursuivant,  Marie Alice, je ne signerai aucun pouvoir ni à vous ni à personne d'autre de votre famille ou de la mienne, elle parla sans lever la voix, soudain très calme et posée, je veux que ce soit clair car c'est sans appel.

Tu es complètement folle!

Je pense qu'au contraire, je n'ai jamais été plus sensée de ma vie. Il n'y a plus rien à discuter, c'est mon dernier mot et je ne veux plus jamais avoir à revenir sur ce thème, est ce clair, Marie Alice?

J'en parlerai...

À mes parents, au Pape ou au Père Noël...rien n'y changera alors ne perdez pas votre temps. Les choses sont comme elles sont, un point c'est tout!

C'était rêver. À croire que ce serait justement le contraire! Madeleine n'avait pas eu le temps de se remettre de la visite de sa belle-mère qu'un appel de sa mère la somma, sans plus de préambules, de se présenter à la demeure St.Aigle dans les délais les plus brefs.

"Voilà qui promet bien de joies!"

Elle rigolait en douce en regagnant le petit séjour accueillant où il faisait bon rêvasser à son aise. La lettre reçue peu auparavant en main, Madeleine se servit un cognac, alluma une cigarette et se laissa aller dans une profonde bergère avec un soupir. La nouvelle de la mort de sa tante Céline la plongeait dans un profond désarroi, celle ci avait été, de loin, le seul membre de la famille avec qui elle avait eu une relation vraiment chaleureuse et humaine.

Tante Céline avait été de ces êtres qui vont par la vie sans s'encombrer de préjugés ni idées préconçues. Elle prônait la valeur du bonheur individuel, de la joie de vivre et la libre pensée, bien entendu le fait de tenir semblables propos l'avait plus ou moins mise au ban de la famille qui la jugeait comme esprit faible et sans doute dérangé. Qu'à cela ne tienne, mariée sur le tard avec Patrick Davenport, un anglais plein d'originalité et sens de l'humour, Céline avait eu une vie pleine et satisfaisante. Le couple avait vécu dans une vieille ferme dont Madeleine gardait un souvenir ineffable. à la mort de Patrick, Céline n'avait pas voulu abandonner son coin de paradis, comme elle l'appelait, se plaisant de cette existence paisible entre murs plus ou moins délabrés, un jardin en folie et une nature bienfaisante. Toute sa vie elle s'était passée de l'avis de autres et  apparemment comptait continuer de le faire depuis l'au-delà en faisant de sa nièce Madeleine la seule et unique héritière de ses biens. Un héritage plus spirituel que pratique, il faut le dire mais qui en ce moment comblait Madeleine bien plus que tout l'or du monde.

Raoul St.Aigle et sa femme Béatrice attendaient. La vieille horloge prenait le malin plaisir d'égrener le temps pour marquer, consciencieusement chaque minute d'un retard inacceptable.
Quand finalement, quelques deux heures plus tard, Madeleine fit son entrée en scène, les esprits étaient chauffés à blanc. Papa arborait une mine rougissante, au bord même de l'implosion et Maman son rictus de reine offensée dans toute sa splendeur.

Me voilà!, annonça t'elle d'un air presque joyeux.

Trêve de pitreries!, gronda Papa, assieds toi!

Je préfère boire quelque chose d'abord...tu veux un cognac, Papa...un whisky? Question de se détendre un peu avant de commencer la fusillade...Maman un petit porto?, sans hésiter elle se dirigea vers les carafons et se servit un cognac bien tassé, sous le regard meurtrier de ses parents.

Depuis quand bois tu si immodérément!?, faillit glapir Maman.

En fait, depuis deux heures, mais ça n'intéresse personne...voilà pour toi, Papa, et pour toi Maman, assura t'elle en leur fourrant une coupe dans la main, alors...

Tu es insupportable!

Et agaçante et Dieu sait quoi d'autre, mais on sait ça depuis longtemps,  j'assume que la mère de Paul vous a mis au courant de ses déboires, je suis la méchante idiote de l'histoire, blablabla...avant que vous ne vous fatiguiez vainement à essayer de redresser quelque tort je vous préviens que je ne pense pas changer une virgule de ce que j'ai dit à Marie Alice, je ne laisse personne fourrer son nez dans mes affaires!

Et je ne laisserai certainement pas que tu ruines une si longue amitié avec les de Neuville simplement parce que tu as...

Vois tu, Papa, depuis que j'ai mémoire, tu as mené ma vie à ton bon plaisir, sans prendre jamais en compte ce que je voulais ou pas. Tu décidais, j'obéissais, plaise ou pas parce que je n'avais pas d'autre recours...

N'ose pas m'interrompre quand je parle!!!, fulmina Papa.

J'ose parce que j'en ai ras le bol de recevoir des ordres, de plier l'échine et jouer le rôle de femme stupide et soumise! Tu as pris ma vie, l'as modelée à ton goût, t'en servant pour tes intérêts...et ne me dis pas que tu ne sais pas de quoi je parle, moi je n'ai rien oublié, elle fit une petite pause, le temps de vider son verre et de défaire le nœud formé à sa gorge, tu as ruiné ma vie...tu as même eu le toupet de me choisir un mari et j'ai dû faire avec...15 ans, Papa, quinze de ma vie jeté aux chiens, à vivre avec cet imbécile fat et imbu de soi...

Madeleine du respect, Paul est..., commença Maman.

Mort et grand bien lui fasse, ce sera la seule bonne chose qu'il ait jamais faite pour moi!...Et puis, vous savez, cette conversation est surréaliste et absurde...je ne suis plus une petite fille, rien de ce que vous direz ou ferez ne me fera changer d'avis...au fait, elle posa son verre, prit son sac et alla vers la porte, je m'en vais...je quitte la ville, je m'en vais vivre ma vie...enfin!!!

Tu es devenue folle!!!

Oh que non, Papa, je n'ai jamais été plus lucide de ma vie!

Sans leur laisser le loisir de placer un mot, elle sortit en trombe et peu après on entendait la porte principale claquer avec un bruit de tonnerre. L'horloge donna l'heure d'un son presque lugubre.

                                          ~~~~

Le village n'avait pas changé. Des siècles de vent, soleil et pluie avaient laissé leur trace sur chaque pierre, dans chaque pavé des ruelles pentues, sur chaque façade, dans chaque petite place ombragée où chantait une fontaine. Avec le cœur serré d'émotion Madeleine découvrait que le boulanger était toujours au même endroit, tout comme le boucher, ou encore l'épicerie. Quelques petites boutiques avaient trouvé leur place ça et là, sans rompre l'harmonie millénaire des lieux. Senteurs et couleurs qui avaient bercé l'insouciance, le bonheur pur et simple d'un passé qui ne saurait revenir.
L'odeur du pain frais finit par l'attirer dans la boulangerie. Elle ne fut pas surprise d'y retrouver Mme. Martin affairée à mettre en place des petits pains dorés et des miches croustillantes.

Bonjour, Mme. Martin...il y a encore des petits pains au chocolat?

La boulangère se retourna et la dévisagea prise court.

Euh...non...fallait venir plus tôt pour...

Avant vous m'en gardiez toujours, là dessous, dans le petit panier..., se trouva t'elle en train de dire, je venais tous les matins...pas si tôt que ça...pendant les vacances...je suis la nièce de...

La petite Madeleine!!! Oh, mon Dieu...Bertrand!!! Viens donc voir qui est là!, tout en appelant son mari elle fit le tour du comptoir et prit Madeleine dans ses bras, sans chichis en essuyant une larme, petite fille!!! Que ça me fait plaisir..., puis la tenant à bout de bras après l'avoir embrassée bruyamment, qu'elle est devenue belle, mon ange...Bertrand!!!

Un gros bonhomme au teint rougeaud couvert de farine fit enfin son apparition et avant d'avoir le temps d'en placer une sa femme l'avait mis au parfum ce qui déclencha une autre séance d'exclamations ébaubies et embrassades attendries.

Après les boulanger, ce fut le tour de la bouchère entrée acheter son pain, celle ci, sans plus de cérémonies alla rapporter les faits à sa voisine, la couturière, qui à son tour en parla au facteur...avant midi toute personne susceptible d'avoir connu Madeleine était au courant de son retour.

Pour la ferme de ta tante, c'est une autre histoire, mon petit...faut penser que Céline n'était plus toute jeune et après la mort de son anglais elle s'est laissée un peu aller...et que dire de la maison...et du reste, c'est un peu parti à vau l'eau mais on sait que les vieilles pierres ça tient...il faudrait quand même...euh, quelques réparations!, Mme. Martin renifla un peu en s'essuyant les yeux du coin de son tablier, pas trop fameux comme héritage mais elle y tenait tant...et elle n'a jamais oublié le bonheur de ces jours que tu passais chez eux...tu étais l'enfant qu'ils n'ont jamais eu...et faut dire que ça lui a brisé le cœur quand ton père t'a emmenée...et lui a interdit de te revoir!

Madeleine  essuya rageusement une larme.

J'aurais dû...

Tu n'étais qu'une enfant...puis la vie a pris un autre cours pour toi...tu es une dame de la capitale...ça se comprend!...On a tous compris...Céline a fini par s'y faire tout comme...lui!

Kyle?..., souffla t'elle.

Qui d'autre donc!?  Vous étiez inséparables..., dit rêveusement Mme. Martin, le pauvre petit a eu un si gros chagrin que sa grand-mère a préféré l'envoyer chez sa famille là bas d'où qu'il venait...mais il est revenu, lui!

Ah!...

Oui, mais enfin... tu veux plutôt aller faire un tour chez Céline...pour te faire une idée!?

Je ne vais pas y faire un tour...je vais m'y installer!

T'installer là!? Mais...on pensait que tu ne venais que faire un petit tour, au nom du bon vieux temps...c'est pas une vie facile pour une dame de la ville, sais tu...c'est du travail...du gros travail...

Pas de souci, j'ai tout le temps du monde!

Le chemin vers la ferme lui sembla plus court que dans ses souvenirs, plus étroit et à peine carrossable, gentiment envahi de mauvaises herbes de toute sorte, les haies latérales avaient besoin d'un bonne taille comme tout le reste d'ailleurs. Le jardin était devenu une espèce de joyeuse jungle inextricable qu'elle se promit de dompter tout en l'adorant. La glycine devenue démesurée étalait sa beauté sur la façade, masquant admirablement les méfaits du temps. Quelques volets pendouillaient tristement sur leurs gonds rouillés, pas mal de tuiles s'étaient fait la malle et une des cheminées menaçait de s'écrouler.
Le souffle coupé Madeleine réalisait que la maison était beaucoup plus grande qu'elle ne l'avait cru, qu'il y avait plus de dépendances que ce dont elle se souvenait et que tout était si tristement vide et mal en point qu'elle eut envie de se mettre à pleurer.
D'une main tremblante elle fit jouer la grande clé dans la serrure en priant pour qu'elle ne coince pas. La porte s'ouvrit dans un chœur de grincements et l'intérieur frais l'accueillit. Au contraire de l'extérieur, tout semblait bien tenu, sous la conséquente couche de poussière mais sentant encore l'encaustique de cire d'abeille que Céline affectionnait tant, tout comme l'odeur à lavande.
Remerciant le ciel d'être venue seule, Madeleine put parcourir la maison en pleurant tout son soûl. Chaque coin et recoin avait un message, un souvenir,  chaque meuble, dont elle ôtait la housse, le gros coffre vert où sa tante rangeait ses belles nappes, le vaisselier bleu, la grande table qui avait, selon Céline, plus de 200 ans. La grande cuisine avec son sol de tomettes rouges et  la carrelage mural de céramique mexicaine.

Je vais faire revivre ta maison, tante Céline...et la remplir de vie, comme tu aimais tant!

À l'étage, les chambres sentaient la poussière et le renfermé, elle ouvrit toutes les fenêtres, quelques volets se détachèrent à grand fracas déclenchant sa folle hilarité. Une famille de souris déguerpit et quelques araignées battirent prudemment en retraite. La salle de bains, offrait un aspect de délabrement pitoyable mais heureusement l'eau coulait et la toilette fonctionnait avec des gargouillis dignes de soupçon. Le chauffe-eau n'inspirait pas grande confiance et de toute façon elle ne savait pas où trouver la manette du gaz.

Eh bien, ma belle...du boulot en perspective!

Elle arriva au rez de chaussée au moment où une camionnette s'arrêtait face à l'entrée et une demi minute plus tard une voix d'homme retentissait.

Eho, la dame de la maison...suis Jules, le plombier...Nanette de la boulangerie m'envoie des fois que vous auriez besoin d'un coup de main!!!

Elle n'y croyait presque pas, mais apparemment on a tous droit à des petits miracles.

Vous tombez du ciel, Jules, on ne pourrait mieux dire!

Ce soir là, Madeleine eut droit à une bonne douche chaude et la toilette ne gargouilla plus. Jules avait promis de passer le lendemain, profitant pour amener son cousin qui était entrepreneur, et deux cousines pour aider au gros du ménage. Il connaissait aussi deux gars qui s'y connaissaient pour tailler les arbres et le reste, un autre qui saurait s'occuper des volets.
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